C’est aujourd’hui Françoise Guérin, en résidence d’auteurs à La Laune, que nous avons eu le plaisir de rencontrer.
Françoise Guérin, est psychologue clinicienne, auteur de littérature policière. Elle a collaboré à l’émission « Les Petits Polars » pour Radio-France.
Et, une originalité, elle a créé une carte postale double. Elle s’ouvre comme un livre et, à l’intérieur, on trouve une nouvelle (Aux éditions D’un Noir si Bleu).
En 2007, elle a publié un recueil de nouvelles : Mot compte double, aux Éditions Quadrature (Belgique) et Un dimanche au bord de l’autre (L’Atelier du Gué) qui a reçu le prix Missives 2009.
Son premier roman, « A la vue à la mort », a reçu le Prix Cognac du Festival du Film Policier (et littéraire) en 2007 et le prix Jean-Zay des lycéens.
En 2007, elle a publié un recueil de nouvelles : Mot compte double, aux Éditions Quadrature (Belgique) et Un dimanche au bord de l’autre (L’Atelier du Gué) qui a reçu le prix Missives 2009.
Elle anime des ateliers d’écriture dans les médiathèques, en milieu scolaire et dans les maisons de retraite.
C’est au cours de son dernier séjour à La Laune, en mai 2012, qu’elle a terminé son dernier roman : « Cherche jeune fille à croquer » paru dans la collection Le Masque.
La psy n’est jamais loin dans le choix de l’intrigue de cet ouvrage. Le détective non voyant Eric Lanester, qui officiait déjà dans « A la vue à la mort » est de retour. Désigné par ses chefs pour renforcer des gendarmes Haut-Savoyards, il doit enquêter sur une série de disparitions mystérieuses de jeunes filles.
Leur point commun : elles ont toutes fréquenté un centre de soins pour jeunes filles anorexiques. La perte de confiance et le poids de l’enquête font que c’est notre détective qui va avoir recours à un psy… pour lui-même. Un excellent polar, avec en prime, la touche personnelle de la psy… Bonne lecture à vous tous…
« A la vue à la mort »
Adapté à la télévision pour France 2, son premier roman « A la vue à la mort », est en cours de montage et ne devrait pas tarder à être diffusé.
Pour en parler, nous retrouvons Françoise Guérin.
Qui a eu l’idée de l’adaptation de ce livre ?
FG – A l’origine, c’est un coup de cœur de Chantal Michaux, la productrice de la maison Native. Ce livre était paru en 2007, il avait eu le prix Cognac cette année-là, elle l’a lu par hasard, ça lui a beaucoup plu, et elle a entamé la démarche de la production de ce film.
Pour l’adaptation, est-ce vous qui avez eu recours à Franz-Olivier Giesbert et Valérie Toranian ?
FG – Ce n’est pas du tout mon choix, ce sont des personnes que je ne connaissais pas. Quand il s’agit d’un roman pour en faire un film, il faut passer par l’étape du scénario. Cette étape nécessite une réécriture spécifique, très technique. Barbara Grinberg avait déjà travaillé sur ce scénario il y a plusieurs années, et dès qu’il s’est agi de l’adapter pour France 2, cette tâche a été confiée à Franz-Olivier Giesbert et Valérie Toranian. Outre leurs activités journalistiques, ils sont aussi auteurs, et la version qui sera télévisée, doit être retravaillée pour passer de l’écrit à l’écran.
Est-ce que vous pouvez, d’ores et déjà, dire si cette version est fidèle à votre livre ?
FG – L’adaptation, elle, est fidèle à l’esprit du livre, on peut en être certain, parce que j’ai suivi tout cela de très prés. J’ai collaboré à la réécriture de certaines scènes en tant que consultante, j’ai beaucoup travaillé sur ce nouveau scénario, je peux donc dire qu’il est fidèle à l’esprit du livre. Maintenant, il y a certaines scènes qu’il faut vraiment adapter pour passer de l’écrit à l’écran. Par exemple, Eric Lanester est mon héros récurent, puisqu’on le retrouve dans «Cherche Jeune Fille à Croquer».
Ce héros, est un analyste en criminologie qui, soudain, sur une scène de crime, devient brutalement aveugle. Donc, tout le roman ou presque, va se faire en caméra subjective, au sens où, c’est Eric Lanester aveugle, qui raconte ce qui se passe pour lui, et comment il continue son enquête sans voir. On avait donc à l’origine un roman raconté par un narrateur qui ne voit pas, comment faire passer ça en film ? Donc déjà, une première adaptation.
Comment avez vous résolu le problème ?
FG – Ça, vous le verrez quand ça passera sur France 2..! Autrement, aussi bien sur le plan artistique que technique, tout a été fait pour que la focale reste sur Eric Lanester, et donc, on est très proche du personnage et la façon dont il perçoit les choses. Ce qui a été très intéressant, c’est le travail qu’il a du effectuer pour se repérer, se déplacer dans l’espace. C’est une personne de l’association Valentin Haüy, qui a eu en charge d’apprendre à Richard Berry (Eric Lanester) un certain nombre de choses, de même qu’à Emma de Caunes qui est le chauffeur de taxi qui l’accompagne.
Vous bénéficier d’un superbe casting : Richard Berry, Bruno Salomone, Emma de Caunes, Hippolyte Girardot, Lucie Marbot, etc… Est-ce que vos personnages, qui maintenant ont pris corps, correspondent à ce que vous imaginiez en écrivant ?
FG – C’est une bonne question, parce que c’est très curieux pour moi. Ce sont des héros que je ne décris pas. Je ne décris pas physiquement mes personnages. Je décris leur caractère, je décris quelques traits, mais personne ne savait si Eric Lanester était brun ou blond. Ça ne me parait pas le plus important. Ce qui était toujours très étonnant quand j’allais parler du livre à des élèves de seconde, les filles surtout, me parlaient du « Beau Eric Lanester» alors qu’il est écrit nulle part qu’il est beau.
Ce qui est curieux, maintenant, après avoir assisté à de nombreuses journées de tournage, Eric Lanester a un corps, une voix – et quelle voix ! – Donc forcément, ça va influencer ma manière d’écrire. Ça me sera difficile, maintenant, d’écrire en ayant un personnage qui n’a pas justement cette épaisseur et ce corps-là.
Vous avez dit que pour vous, ça été une expérience enrichissante, pourquoi ?
FG– Il y a un travail de longue haleine pendant cinq ans de la maison de production. Il y a un travail très approfondi entre le réalisateur, Franck Mancuzo, la productrice artistique, Chantal Michaux et moi-même, pour passer du scénario initial à celui livré pour le tournage. Il y a un travail très minutieux de relecture, de confrontation entre le réalisateur et moi-même. Lui qui est soumis à des impératifs techniques et aux exigences de la production, et moi qui m’accroche au respect et à l’esprit de mon roman.
Bien sûr, des différences il y en a, par exemple le chauffeur de taxi du roman est un vieil alcoolo tabagique, il se retrouve transformé en une Emma de Caunes, pimpante et vive. C’est un choix de la production pour l’aspect télévisuel dans le but de contraster avec le rôle sombre de Richard Berry.
Vous avez déclaré être sur le tournage pour assurer la cohérence psychologique avec les personnages ? Expliquez-nous ça…
FG – C’était très important pour moi, de pouvoir m’assurer que le traitement, et de la maladie mentale, et de l’aspect psychanalytique soient vraiment fidèles à la réalité. On voit trop souvent dans les fictions télévisuelles, des amalgames, des approximations ou encore des clichés énormes. Moi je tiens beaucoup – peut être parce que je suis psychologue et que j’ai à faire à la maladie mentale continuellement – je tenais beaucoup à ce que ça ne soit pas des personnages qu’on galvaude, que l’on ne dise pas ou que l’on ne fasse pas n’importe quoi avec eux. Pour cela, il y a eu tout un travail, notamment sur les scènes psychanalytiques, pour s’assurer de la justesse des répliques. Bien sûr, ça produit du débat avec le réalisateur, mais c’est tout à fait passionnant. Le travail avec la psychanalyste est d’autant plus intéressant, que c’est une vraie psychanalyste qui parle et agit comme tel. Dans les films, on vous propose souvent des psychanalystes qui sont un peu n’importe quoi.
Ce qui m’a beaucoup intéressé dans ces journées sur le tournage, c’est la chorégraphie, le ballet des techniciens où chacun sait ce qu’il a à faire et où l’on sent que tout est réglé et très professionnel. Maintenant, bien sûr, je commence à être impatiente et voir enfin la diffusion.
Nous aussi avons hâte de voir ce téléfilm. Compte tenu de la distribution et la qualité du roman, on se permet de ne pas douter de l’excellence du résultat.
Encore un grand merci à Françoise Guérin pour son accueil et sa disponibilité.
Entretien réalisé à la Résidence d’auteurs de La Laune
Edmond Lanfranchi