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Première partie

C’est l’une des auteures Québécoises reconnues internationalement qui nous a fait le plaisir de nous recevoir. Claudine Bertrand, est née à Montréal où elle a poursuivi ses études à l’université du Québec.  Elle fait des études de journalisme et d’écriture cinématographique et c’est avec une maîtrise en étude littéraire, qu’elle va enseigner jusqu’en 2010.  Cependant, sa passion demeure l’écriture et particulièrement la poésie. Elle publie de nombreux ouvrages  qui lui valent  une moisson de divers  prix littéraires. Son rôle central dans la poésie Québécoise la fait nommer ambassadrice de la poésie par son gouvernement  Elle donne des conférences à travers le monde, notamment en Afrique, son autre passion. C’est avec plaisir que nous la retrouvons pour l’entretien qu’elle nous a accordé.

Tout d’abord, Claudine Bertrand, quelle est votre conception du métier d’écrivain ?

CB – Pour moi, le métier d’écriture, c’est vraiment le langage de l’essentiel et la poésie, c’est quelque chose qui m’a interpellé très jeune, à quinze ans. J’avais un professeur extraordinaire. Elle avait une façon très vivante de nous parler de littérature. Cette façon de mordre dans les mots et de nous parler d’auteurs que nous ne connaissions pas pas : Rimbaud, Verlaine, Baudelaire, nous faisaient entrer dans un univers mystérieux. Mais elle ne nous rendait pas la poésie hermétique. Elle avait une façon de nous expliquer le texte du Dormeur du Val, par exemple, en s’interrompant pour nous parler de Rimbaud, qu’à tel point, nous avions l’impression qu’il était là devant nous. Elle le faisait vivre, tant elle avait intériorisé la matière de cette œuvre  majeure entre seize et vingt ans qui pour nous, devenait une belle histoire. En fait, elle nous ouvrait les esprits à la fois au sens critique, à la présentation et à la qualité des mots. Il y avait quelque chose de fascinant. C’est cette fascination des mots qui peu à peu, m’a amené à écrire. Petit à petit, l’écriture vient et c’est un sport avec les mots, une gymnastique que je pratique tous les jours et que je ne peux pas abandonner parce que c’est une respiration, une raison de vivre.

Vous m’avez cité des auteurs, Rimbaud, Verlaine, Baudelaire : trois poètes, pas de romanciers. Quel est le rôle du poète par rapport au romancier, quel est le rôle du poète dans la société ?

CB – Le poète a plusieurs rôles, il peut avoir un rôle social et aussi de faire ressentir les choses. Comme je disais tout à l’heure, le langage de l’essentiel, c’est qu’avec peu de mots, il dit beaucoup. Donc c’est de dire plus avec moins de mots. Donc,  il y a une condensation du message. Donc, un message, c’est de faire voir l’invisible, aurait dit Eluard. C’est de faire voir des réalités qu’on ne verrait pas parce qu’on n’a pas les yeux assez ouverts. Il faut s’ouvrir les yeux pour découvrir la beauté, l’humanité, parce que ça touche à l’humain le plus profond.

Plus que le romancier ?

CB Oui, plus que le romancier. Le romancier  va décrire une situation, il raconte une histoire, la vie d’une communauté, il y a un héros, des obstacles à traverser, une conclusion qui finit bien ou mal. En poésie on ne va pas raconter l’histoire de la même façon, on va évoquer. C’est le sens de l’évocation. On ne dit pas tout, c’est-à-dire qu’on laisse place à l’imaginaire, je vais évoquer une situation, mais je ne vais pas la décrire. Si je la décris, je dis tout et mon lecteur n’est plus dans l’imaginaire. Tandis que là, on lit un poème, et le lecteur peut s’introduire lui aussi dans la lecture et il se produit comme un dialogue intérieur, donc on touche plus l’intériorité. Si je suis journaliste, je suis un reporter de l’intérieur. Il y a l’apparence, mais il y a derrière où l’on va chercher quelque chose qui est commun à tout être humain. Suivant les écritures, ça peut être une quête amoureuse ou spirituelle. Donc c’est d’aller voir du coté du sacré, c’est aller à l’essentiel. Je ne dis pas que le roman n’y touche pas. Mais, il ne parle pas de l’humain pas de la même manière. Je ne veux blesser personne, mais quand on a lu un roman, on ferme le livre, on se souvient de l’histoire et on n’a pas besoin de la relire. Alors qu’un poème, on y revient parce que c’est une sorte de méditation, donc il y  a un sens qui est très concentré  et la signification est multiple, c’est le langage des poètes de multiplier les sens. On peut ouvrir une page au hasard, et le poème nous fera découvrir des sens différents suivant le moment, et l’époque où on le lit.

Vous êtes intarissable sur votre passion de la poésie, passion qui vous a valu de nombreux prix littéraires que nous n’énumérerons pas, mais il y en a un : le Prix Tristan Tzara, que j’aimerais évoquer. Quand on connait le parcours du bonhomme, qu’est ce qui vous a valu ce prix ? vous êtes quoi : anarchiste, attirée par le dadaïsme, le surréalisme. Pourquoi vous avez eu ce prix ?

CB –   Oh là là, quelle question !!! D’abord, j’avais un grand respect pour Dada et coïncidence, j’ai enseigné le surréalisme pendant de années. En fait, on peut penser que recevoir un prix est synonyme de prendre un engagement C’est sûr que par la poésie, j’ai pris position pour les plus humbles, pour revendiquer pour une plus grande justice sociale. Il est vrai que la poésie est un contre pouvoir et on essaie, par nos textes, d’ébranler les gens et dans ce sens-là, oui, il y a une conscience éveillée. Ce que j’avais retenu du surréalisme, c’est cette grande liberté d’expression. Le dadaïsme, c’est plus d’aller vers de la provocation. Il est vrai que mes premiers textes étaient plus provocateurs, parce que c’est une affirmation de soi , d’une société. C’est vrai  que dans mes premiers écrits, c’était une affirmation de l’écriture des femmes, c’était beaucoup plus combatif. Dans ce sens là, c’était de détruire les préjugés, donc une poésie plus contestataire, plus revendicatrice. Peut-être, j’ai eu le prix, parce qu’il y avait plus de provocation avec les mots. En cette époque où tout est formaté, la poésie, en ce sens, est une forme de contestation de la société.

Fin de cette première partie

La semaine prochaine, accompagnés  par les femmes,  nous poursuivrons notre voyage du Québec  à l’Afrique.

   Edmond Lanfranchi

 

Guy Roca

Avec quelques amis intéressés par l'écriture, la photo, la vidéo, les nouvelles technologies de la communication, nous avons créé Vauvert Plus en novembre 2010. Avec la même passion, la même ardeur, la même ambition, je participe aujourd’hui à la belle aventure de VOIR PLUS, le journal numérique de la vie locale et des associations, de l’actualité culturelle et sportive en Petite Camargue.
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