L’ancien journaliste était l’invité des 30 ans du syndicat mixte de la Camargue Gardoise au Scamandre le 30 septembre. Ses deux derniers ouvrages présentés pour dédicace ont donné lieu à de beaux échanges sur le rôle de la littérature et du livre dans notre société. Devant un auditoire très attentif, Claude Sérillon s’est prêté au jeu des questions réponses avec son éditrice.
Ses propos ont mis en exergue les contradictions de l’évolution des technologies et de l’information avec la disparition de la vraie communication. Lui qui a été un présentateur vedette du journal télévisé a évoqué la sur-information avec ses effets pervers, déconstructeur de notre société. « L’intelligence artificielle, les réseaux sociaux, les chaînes d’information en continu empêchent de penser par soi-même. On sait à peu près tout et tout de suite, mais en surface. » Si l’individu surfe en effet sur les médias et l’internet, la littérature permet de réfléchir, se poser, prendre le temps de penser. Un petit effort indispensable selon l’écrivain pour se construire une colonne vertébrale pour une véritable identité et éviter le clonage. « Cela ne nous empêche pas d’être ensemble et de communiquer. » Le livre ne coupe pas du monde. Il ouvre au contraire vers un autre monde et vers l’autre. « Quand je vois une personne en train de lire dans un transport en commun, je vais le féliciter ! » Lire un livre devient un acte presque revendicateur comme pour dire non à cette société du smartphone. Trouver la vraie information devient un acte contraignant. « Il faut piocher partout, mais cela reste un choix privilégié qui permet de garder la main et l’esprit. » Claude Sérillon le poète a fait un beau parallèle entre observer les oiseaux au Scamandre dans leur milieu naturel et regarder des images d’oiseaux sur des écrans. « Le ressenti, l’espace n’est pas le même. » Si le public venu pour l’écouter était facile à convaincre, l’auteur qui ne compte plus le nombre d’ouvrages qu’il a publiés a su le captiver par son aura et son expérience de journaliste. « C’est le privilège de l’âge » a-t’il ajouté, « de pouvoir se faire plaisir en faisant de la poésie. » Elle agrandit le monde selon lui et ouvre des portes pour l’évasion. « Lorsque l’on apprend des poèmes, même si on les oublie, il reste toujours une petite musique, des mots, une phrase. » La littérature n’est pas morte et est devenue au contraire indispensable. L’important est de ne pas garder pour soi, et faire circuler les ouvrages que parfois les gens ne peuvent s’offrir. Les boîtes aux livres sont d’excellents passeurs de littérature tout comme les écrivains qui présentent leurs livres. « J’ai la chance d’être publié. C’est mon devoir d’aller en parler, essayer de convaincre que la littérature a un rôle dans notre vie actuelle et maintient le lien social. »
Une relation qui ne doit pas être virtuelle comme le déclame son dernier ouvrage titré « Est-ce que quelqu’un m’entend ? » Une phrase qui lui est venue en voyant des images terribles du séisme en Turquie. Claude Sérillon a traduit son émotion en poèmes sur la manière de s’écouter et de s’entendre, écouter ou entendre, essayer de se parler entre personnes réelles. Une manière de rester optimiste face à l’actualité souvent terrible.
Le second ouvrage présenté « Se donner rendez-vous », montre l’équilibre vital entre le journaliste, observateur, et l’homme avec sa sensibilité face aux événements. Allier la dure réalité du monde tout en gardant des moments d’évasion grâce à la poésie. La littérature ouvre des horizons que la sur-médiatisation ferme tout en faisant miroiter une liberté en surface.