Le changement dans la continuité. Le fameux slogan pourrait s’appliquer au passage de relais entre Philippe Guyon et Patrick Leclerc à la tête de l’école de musique où un pianiste prend la suite d’un saxophoniste.
Patrick Leclerc a pris ses fonctions de directeur intérimaire le 11 octobre dernier. Professeur de piano dans l’établissement depuis 11 ans, il tient également les claviers du big band de Petite Camargue, la formation de jazz créée et dirigée jusqu’à ce jour par Philippe Guyon.
Le Monde de l’accordéon
Originaire du Sud-ouest, né en 1963, Patrick Leclerc s’est senti très tôt attiré par la musique et plus particulièrement par l’accordéon. Il avait à peine quatre ans quand il découvrit ce fabuleux instrument. Sous aucun prétexte, il n’aurait loupé alors le rendez-vous dominical de l’ORTF « Le Monde de l’accordéon ».
Chaque fois qu’il y avait cette émission, j’arrêtais tout et je m’asseyais devant la télé chez mon grand-père. Je ne bougeais plus, j’étais en admiration devant cette émission. Mon grand-père a fini par dire à mes parents : mais ce petit gamin, il faut qu’il fasse de la musique !
À l’adolescence, il s’oriente vers une formation de musicien. Lors d’un examen dans son Sud-ouest natal, il a la chance de rencontrer un jeune et brillant accordéoniste originaire d’Avignon. Ce dernier le convainc de prendre son envol, de quitter sa région et de suivre la pédagogie du maître réputé, Jacques Mornet. Jacques Mornet est le père de la professeur de chant de l’école intercommunale de Petite Camargue, Mylène Mornet.
Vers l’âge de 21, 22 ans, il rentre très jeune dans le métier, fait beaucoup de scène dans différents orchestres et groupes… toujours à l’accordéon. Il commence aussi à faire un peu de clavier dans le cadre de ces orchestres. C’est à cette époque qu’il songe à enrichir sa formation de pianiste.
Je me suis dit : J’ai passé tous mes diplômes à l’accordéon, je suis jeune, j’ai le temps, pourquoi ne pas compléter mon bagage de musicien.
Un copain musicien, professeur au conservatoire de Cavaillon avec qui il jouait de temps en temps, lui fait part de la création d’une classe d’enseignement d’accordéon et de piano dans l’établissement.
C’est ainsi que j’ai démarré l’enseignement à ce moment-là en 1987 au conservatoire municipal de Cavaillon.
De l’accordéon au jazz
Dans la vallée de la Durance, il fait encore une belle rencontre qui lui ouvrira un nouvel horizon musical. Au conservatoire, le vauverdois Thierry Riboulet dirige le big band. Celui-ci le presse de rejoindre le groupe.
Patrick, me dit-il, je n’ai pas de pianiste au big band, ce serait bien que tu viennes. J’ai hésité car je n’avais pas beaucoup de pratique, il a insisté et pour moi, ça a été une révélation.
Donc voilà, ça a démarré comme ça mon histoire… avec mon diplôme d’accordéon.
1990, c’est le début de l’aventure aveyronnaise. Suivant un ami, professeur de batterie, il est pressenti pour enseigner l’accordéon et le piano de jazz au conservatoire départemental de l’Aveyron. Une grosse structure, 12 antennes, 1 600 élèves.
Une condition toutefois. Et, de taille ! Il doit préalablement préparer un diplôme d’État.
Je n’avais pas le choix, je me suis mis à bosser comme un fou. J’avais un orchestre de bal, j’avais les cours au conservatoire, je dirigeais l’harmonie, j’avais un gamin et je devais suivre une formation de 15 heures par semaine. Je bossais jusqu’à plus d’heures, tous les jours, du lundi au samedi.
J’ai passé tous mes diplômes et j’ai obtenu ce prix du conservatoire avec équivalence Diplôme d’État.
Peu après, le directeur du conservatoire m’a proposé de prendre la direction d’une antenne, une école de musique. Je me suis retrouvé directeur d’antenne sur deux écoles différentes. Ça a été très formateur pour moi. Ça m’a permis de pouvoir manager une équipe et de comprendre que chaque personne est différente. Et on doit aborder chaque personne différemment pour faire passer des projets ou expliquer les choses.
Des changements dans sa vie personnelle, vont le conduire après plusieurs années passées dans l’Aveyron à déménager dans le département voisin de l’Hérault. Les allers-retours quotidiens Montpellier-Rodez deviennent de plus en plus contraignants et pénibles. Aussi, c’est avec beaucoup d’enthousiasme qu’il accueille sa nomination en 2011 à l’école intercommunale de musique de Petite Camargue. Une nouvelle opportunité professionnelle et artistique s’offre à lui.
L’école intercommunale de musique, fleuron culturel de la Petite Camargue
Depuis 11 ans maintenant, Patrick Leclerc exerce ses talents de musicien dans l’établissement du Sud-gardois dont la renommée ne cesse de croître. L’artiste et le pédagogue qui ne font qu’un ont trouvé toute leur place en territoire camarguais.
Prendre le relais de Philippe Guyon représente un challenge formidable. Perpétuer l’esprit de l’école, conforter ses acquis et en même temps conduire son évolution, voilà les tâches qui attendent le nouveau directeur.
Apporter sa pierre à l’édifice
La philosophie de Philippe, son cheval de bataille, ce qu’il faut absolument garder, c’est : la musique pour tous. Et l’accès à la musique pour tous.
On est un service public, on est au service du public – ça, il ne faut jamais l’oublier – et on a une chance à l’école de musique, c’est ce contact avec les élèves et cette facilité de pouvoir jouer ensemble. Il y a déjà beaucoup d’ensembles, l’harmonie, l’orchestre symphonique, le big band, la chorale, l’ensemble guitare, l’ensemble rock, l’ensemble jazz… C’est déjà énorme ce qui a été fait dans cette école… Mais on peut aller plus loin encore.
Moi, ce que je voudrais emmener, c’est cette ouverture de l’école vers l’extérieur… sur des nouveaux projets pédagogiques… sur un vrai travail entre départements d’instruments et entre professeurs.
Qu’est-ce qu’on peut monter ensemble ? Pourquoi ne pas associer l’orchestre symphonique avec l’ensemble guitare ? Une vraie transversalité entre les différents professeurs et mettre en place des pédagogies ou des projets artistiques mélangés entre tous.
Encourager et conseiller des groupes de jeunes en formation et en créativité. On appelle ça des parcours personnalisés. Autour de jeunes ados qu’on pourrait encadrer et les aider à faire des scènes ouvertes dans un lieu, un bar, un restau…
La musique est un vrai lien social. Il n’y a pas de frontières dans la musique. Il n’y a pas de ségrégation. C’est un des moyens pour que les peuples vivent heureux ensemble.
Je crois beaucoup à l’avenir de l’école. Les gens vont avoir besoin de se retrouver de partager un destin commun. On vit des périodes difficiles, ils vont avoir besoin de se retrouver sur des projets, oublier les soucis, faire de la musique. C’est le vivre ensemble sur le plan culturel.