Une Camargue authentique et plus vraie que nature, une immersion simple, sans chichis, au cœur de la manade Aubanel pendant les quatre saisons des années 1965, 1966, des images rares du grand raseteur André Soler, c’est le privilège que nous a offert la projection du film « Un taureau, nommé Marius, une histoire de Camargue », samedi dernier à Vauvert.
Présenté par le service culturel de la Ville et l’Adjointe au maire, Laurence Emmanuelli, en partenariat avec Bernard Raynaud, président des Écrans Britanniques et l’association des Avocats du Diable, présidée par Eddie Pons, ce documentaire a été produit et réalisé par Christopher Parsons et la BBC à la fin des années 60.
Comme l’a expliqué en introduction, Bernard Raynaud : « Que la BBC s’intéresse à la Camargue, aux oiseaux, à la faune, à la flore, on a l’habitude, mais la nouveauté, l’originalité, c’est que le vrai sujet du film, c’est surtout la course camarguaise, la bouvine, la fé di biòu. »
L’auteur du scénario, Gérald Durrell, frère de Lawrence, le romancier qui s’était établi à Sommières, avait rapporté au cinéaste animalier, Christopher Parsons, qu’il y avait dans le midi de la France, des fadas qui faisaient des kilomètres pour voir courir les taureaux, qui élevaient des statues à leur gloire, qui les enterraient debout, la tête tournée vers les Saintes- Maries de la Mer. L’idée du documentaire était née.
Et, au bout de ces 54 minutes, les anglais qui ont vu le film savaient tout ce qu’il fallait savoir de la course libre. Ils savaient beaucoup de choses sur le travail des manadiers et ils avaient découvert une Camargue qu’on ne voit pas tous les jours, en dehors des cartes postales.
Diffusé en mai 1967, le film a connu un tel succès qu’il a été diffusé une seconde fois, l’année suivante.
En France, hormis une projection privée aux Saintes-Maries de la Mer, principal lieu de tournage, il n’a été découvert par le public nîmois qu’en octobre dernier, la veille de la finale du Trophée des As.
Après la projection, les échanges entre l’écrivain, ancien raseteur, Jacky Siméon, Marion Mazauric, des éditions Au Diable Vauvert, le manadier Béranger Aubanel, Eddie Pons et Bernard Raynaud ont captivé le public.
Immanquablement, la question « Est-ce que les taureaux ont changé ? » a été au centre des discussions. Pour Béranger Aubanel, « le taureau en lui-même a toujours le même esprit. Il est aussi combatif. Peut-être plus sportif comme le sont devenus les raseteurs ». Une évolution corroborée par Jacky Siméon : « On voyait dans le film des rasets beaucoup plus courts. Les nouvelles arènes ont fait évoluer les raseteurs qui sont devenus plus athlétiques mais peut-être moins techniques qu’autrefois ».
Comme on feuillète l’album de famille, Béranger Aubanel s’est remémoré ses souvenirs d’enfance. « Je vois dans le film mon grand-père, Henri, avec son cheval, Méphisto. C’est lui qui m’a appris à monter à cheval. J’avais 7 ans ». Jacky Siméon, grand admirateur d’André Soler, a évoqué cette légende de la course camarguaise.
Et Marion Mazauric de conclure : Le fil rouge du film, c’est la vénération du taureau. À un moment où les tauromachies sont remises en cause, que ce soit la course camarguaise où la tauromachie espagnole, c’est tellement ce qu’on aurait pu montrer à toute la France au mois d’octobre pour leur expliquer que les gens qui aiment les tauromachies en fait, ce sont eux qui aiment vraiment les animaux.

