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« Brétou » nous invite au Bar du Caveau.

Au-delà de ses activités sportives, Paul Barthès a participé à la vie associative vauverdoise avec le bar du Caveau.

Footballeur, ça ne dure qu’un temps. Dès le début de sa carrière professionnelle, Paul a intégré cette réalité. En décembre 1951, avec Mimi, ils ouvrent le bar du Caveau.

L’établissement, situé à l’angle de la rue des Capitaines et de la rue Carnot, fonctionnait déjà comme débit de boissons. Le dernier gérant était Joseph Allègre. Pendant les vendanges, on s’y divertissait au son d’une orgue de barbarie ; la propriétaire, surnommée « La Pallue », confectionnait des chapeaux et vendait des déguisements pour les bals masqués.

Paul et Mimi vont le transformer et lui donner une nouvelle dynamique.

La notoriété grandissante de Paul et l’accueil souriant de Mimi vont attirer une nouvelle clientèle.

Le FCV qui auparavant avait son siège au café du Commerce puis au café des Arts, chez Louis Lauriol, s’installe au Caveau, lorsque Paul et Mimi en prennent les rênes. Le mundillo sportif vauverdois s’y donne rendez-vous. Servir au bar, dès lors,  n’est pas de tout repos.

Quand Paul partait à l’entraînement ou en déplacement, Gilbert Auzilhon et son épouse Simone venaient donner un coup de main. Plus tard, Fernando, prit le relais. (Fernando, qui avait fui la guerre civile en Espagne, était venu à Vauvert à l’occasion de la construction du collège Jean-Macé).

Au quotidien, l’activité du bar reposait surtout sur Mimi. Paul intervenait plus ponctuellement lors des apéritifs du week-end.

Après sa carrière de footballeur, Paul va exercer le métier de chauffeur, conduire des camions ou faire les saisons à la cave coopérative au moment des vendanges.

Dès lors, il s’implique pleinement dans la vie du village. La chasse, la pêche, les traditions taurines et bien sûr  les boules occupent ses loisirs. Mais l’âme du joueur et du compétiteur demeure en lui.

 

Après le football, Paul se prend de passion pour les boules. Licencié à l’EBJC (Entente Boule Joyeuse Cristal) ; il participe à de nombreux concours régionaux, en doublette ou en triplette. Tireur ou milieu, il fait souvent équipe avec Henri Girardet, Raymond Erb, Gérard Auzilhon, Aimé Ribes, Gaby Reynaud, Jean Dusfourd, Pierre Jean, dit « Jean de la Régie », Marcel Cadenel,…

Champion du Gard en 1979 avec Henri Girardet et Antonin Pradier, il a également joué plusieurs fois en championnat de France.

Revenons au bar du Caveau et à ses nouveaux animateurs.

Peu de temps après leur installation, Paul et Mimi doivent essuyer un sinistre qui finalement les liera encore davantage à cet établissement. Une nuit, la toiture du bar s’est effondrée ; sans faire de victimes, heureusement. Tout l’étage a été endommagé ; le rez-de-chaussée, par contre, a été protégé par les voutes en pierres. Je me souviens, la veille, nous avions un repas des dirigeants du club. Une chance, je vous le dis !

Mais pour nos jeunes commerçants, c’est un coup dur. D’autant que le propriétaire rechigne à engager les réparations. Alors, sur les conseils de Maître Sadoul, Paul et Mimi décident d’acheter les murs en viager et de faire les travaux à leur compte.

Outre le FCV d’autres associations avaient leur siège au bar du Caveau.

Effectivement, quand ils ont pris le café la Lyre vauverdoise y tenait déjà ses quartiers. C’était l’Orphéon, une chorale d’hommes, présidée par Augustin Auguste, l’ancien régisseur- accessoiriste de la troupe Désir. Au milieu des années soixante, sous la présidence d’Elie Thérond puis de Robert Albaret, la Lyre vauverdoise va alors connaître une vraie révolution. La mixité y fait son chemin, le répertoire se modernise et les répétitions  apportent une touche d’ambiance festive au Caveau.

L’autre association qui concourait à l’animation artistique du café, c’était l’association musicale, présidée par Henri Dumas puis plus tard par Jacques Loubier.

Tous les jeudis soirs, vingt à vingt-cinq musiciens faisaient résonner les voutes du café lors des répétitions de l’harmonie vauverdoise dirigée successivement par Jacques Pierson, René Vedel et Aimé Minair.

Quelques années plus tard, après que Paul eût délaissé la pelouse des stades pour la terre battue des boulodromes, l’Entente Boule Joyeuse Le Cristal s’installa au bar du Caveau. En fait, il existait deux associations  de boulistes sur la commune : la Boule Joyeuse, qui avait son siège au café des Arts (aujourd’hui L’Embuscade), et la Boule le Cristal qui, elle, était au bar Le Cristal. Elles décidèrent de fusionner sous le nom d’Entente Boule Joyeuse Le Cristal et d’élire domicile au bar du Caveau.

Tout comme les autres cafés de Vauvert, le Caveau était avant tout un lieu de convivialité.

A l’époque, les cafés étaient le centre de la vie sociale du village. Les gens venaient pour y discuter et s’y divertir. Il n’y avait pas encore la télévision. Du reste, Paul et Mimi ont été les premiers à l’installer au bar.

Les habitués venaient surtout pour jouer aux cartes. Le soir, avant et après souper, ils se concentraient sur des parties de belote, de rami ou de tarot jusqu’à la fermeture. Le bridge est venu plus tard. Une table s’était formée avec Fernand Marc (le père de Néné Marc, distillateur de profession), Antonin Arnaud, le coiffeur, Monsieur Noguier, viticulteur ; Paul la complétait. Enfin, il se jouait aussi un peu au poker.

Au milieu du bar, trônait également un billard où quelques adeptes s’adonnaient au six ou au carambolage.

Mais le jeu le plus populaire demeurait incontestablement le loto.

De novembre à février, comme maintenant, on jouait au loto dans les cafés. En dehors des fêtes, les parties s’y déroulaient le samedi soir et le dimanche soir avant et après souper. Chaque association organisait son loto hebdomadaire dans son siège. Les parties se jouaient dans une ambiance bon enfant en cinq ou six quines et un ou deux cartons pleins. Volailles (dindes, chapons, poulets, pintades), gibiers (lièvres, perdreaux, faisans), puis plus tard, filets garnis, constituaient  les lots. Exposés sur la devanture du café, ils attiraient les joueurs. Quelques « mordus » faisaient même du « lèche vitrine » de la rue Carnot au Jeu de Ballon, comparant les lots avant d’acheter leurs cartons.

La veille les organisateurs allaient choisir les dindes, reines du loto, et s’approvisionner chez  Maurice Mailhan. Ce dernier avait pris la suite d’Augustin Auguste pour la fourniture des volailles et gibiers aux sociétés. Les dindes étaient parées de rubans en papier crépon pour être présentées sous leurs plus beaux atours. Illusion de la réalité parfois. Le poids et le degré de fraîcheur de certaines ne correspondaient pas forcément à la vision de l’étalage. Mais, Maurice Mailhan toujours accommodant n’hésitait pas à remplacer une volaille à l’aspect douteux.

Pour Noël, ceux qui n’allaient pas à la messe pouvaient participer au loto de l’Arbre de Noël qui se jouait à carton plein. Perdreaux, grives, étourneaux, mandarines, papillotes, garnissaient le sapin. Au pied de l’arbre, gâteaux, chocolats, confiseries, attisaient la convoitise des joueurs. L’heureux gagnant n’avait plus qu’à se munir d’une corbeille et à savourer l’instant magique de cette belle cueillette.

A l’occasion des gros lotos de Noël, ont jouait dans plusieurs cafés en même temps ; c’était avant que les associations ne se regroupent en une seule organisation, les sociétés réunis. On annonçait les numéros d’un café à l’autre par les fenêtres. Quand, il faisait froid, on se gelait. Quand, on criait « là ! » aux Arts, au Caveau ou au France, avant que la nouvelle arrive au Paris ou au Commerce, il s’écoulait un laps de temps qui pouvait parfois engendrer des litiges. Mais, rassurez-vous, tout se réglait dans la bonne humeur. Du reste, pour éviter ces petits désagréments, on nommait les derniers numéros très, très, très lentement. Le suspense n’en était que plus intense.

Face au succès grandissant des lotos, les associations qui se sont regroupées vont en améliorer l’organisation. L’entreprise d’électricité Jo Guyot installe alors une sonorisation inter-cafés avec une extension jusqu’à la salle paroissiale du Château.

Parlez-nous un peu des « nommeurs », ces animateurs des parties de loto.

Avec plaisir. J’ai moi-même nommé mainte fois au Paris ou au Caveau.

Les « nommeurs », ce sont un peu les « Monsieur Loyal » du jeu de loto. Ils procèdent au tirage des ballotes après les avoir « bouléguées », énoncent les numéros et veillent sur le règlement.

Avant, la sonorisation des cafés, les « nommeurs » étaient plutôt des « crieurs » car il fallait se faire entendre dans les grandes salles à l’étage. Alors, mieux valait être doté d’une bonne voix. Ce qui n’était pas le cas de tous les « nommeurs ». Je pense en particulier à ce brave « Kaki », Henri Airault, qui allait chercher ses « wouououou…ite » (huit) au fin fond de ses cordes vocales. Une habitude qu’il a conservée par la suite malgré l’aide bienvenue du micro.

Jusqu’au début des années soixante, les parties de lotos se nommaient en patois. L’énonciation des numéros donnait lieu à des jeux de mots et à des calembours en dialecte Nîmois. Quelques uns, francisés depuis, restent toujours d’actualité. Je garde un souvenir amusé de ces « nommeurs » à la verve intarissable ; « Pépère » Chambefort, pour ne citer que lui, n’avait pas son pareil pour tenir les joueurs en haleine. Comme on dit chez nous, il le faisait venir de loin.

L’arrivée des rapatriés d’Algérie mit un terme à l’usage du patois dans les parties de lotos. Les « Pieds Noirs » voulaient bien s’intégrer au village, participer à la vie associative, mais de là à apprendre le patois… les jeunes, également, le parlaient de moins en moins. Le patois disparu, la bonne humeur continua malgré tout d’imprégner le jeu favori des vauverdois.

Au bar du Caveau, Joseph Radelyevitch, le président du club de football, donnait libre cours à son imagination : « les baraquettes de Codognan » se substituant au célèbre « quaraquaqua ». Volontiers galéjeur, lorsque l’équipe première du FCV gagnait, il se montrait moins disert les soirs de défaite. « Joseph, qu’est-ce qu’ils ont fait Vauvert ?» lui demandaient quelques esprits espiègles.  « Je ne vous répondrai pas.»

Au début des années 70, la construction de la salle Bizet a mis un terme aux grands lotos dans les cafés.

Oui, et c’est un peu dommage pour le côté convivial et folklorique. Les cafetiers y ont perdu aussi une part d’activité. Mais, les joueurs de loto et les associations organisatrices n’ont pas eu à s’en plaindre. Partout ailleurs, il commençait à se jouer dans de grandes salles ; la salle Bizet a permis de faire face à la concurrence et d’éviter l’évasion de la clientèle.

Paul et Mimi ont tenu le bar jusqu’en 1974 et leur fils Jean-Marie et son épouse, Christiane, ont pris la suite pendant une dizaine d’années.

Vingt-trois ans derrière un comptoir, ça fait un bail. Et si ce n’est pas toujours une sinécure de tenir un bar, Paul et Mimi ont eu le privilège de voir défiler au Caveau toute une tranche de vie vauverdoise.

Guy Roca

Avec quelques amis intéressés par l'écriture, la photo, la vidéo, les nouvelles technologies de la communication, nous avons créé Vauvert Plus en novembre 2010. Avec la même passion, la même ardeur, la même ambition, je participe aujourd’hui à la belle aventure de VOIR PLUS, le journal numérique de la vie locale et des associations, de l’actualité culturelle et sportive en Petite Camargue.
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