Il est une très ancienne association peu ou mal connue et qui pourtant mérite de l’être. Pour un peu mieux la connaitre, nous avons rendu visite à Sésame Autisme, où Olivier Colas, chef d’exploitation, va tout nous dire sur cette institution.
Olivier Colas, voulez-vous nous présenter votre association son but et ses activités ?
O.C. – Nous sommes implantés ici depuis les années 2000 et nous accueillons quarante personnes handicapées qui travaillent à l’ESAT (Etablissement et Services d’Aide par le Travail) de La Pradelle et qui sont logées sur le Canton de Vauvert. A l’origine Sésame Autisme est une association de parents qui ont voulu proposer à leurs enfants un style de vie un peu plus agréable que ce que l’on trouvait à l’époque dans les hôpitaux psychiatriques.
Nous avons fait un tour de la maison et nous avons surtout vu des adultes.
O.C. – Notre partie à nous, ce sont des adultes. Nous avons aussi un secteur enfance et petite enfance, mais, ici, il n’y a que des adultes qui travaillent. Nous leur proposons deux styles d’activités. L’une essentiellement agricole, production de légumes, vente de bois de chauffage, la vigne, les oliviers… L’autre partie est une activité de prestation de services : nettoyage industriel, entretien d’espaces verts, nettoyage de véhicules ou travaux du bâtiment.
Est-ce que le fait d’offrir des activités à des personnes handicapées, consiste simplement à les mettre au travail ?
O.C. – Non, le but est de leur faire structurer leur vie, de découper leur journée, découper leur semaine, découper leur mois, découper leurs saisons.
Vous avez des personnes différemment atteintes par la maladie, comment gérez vous ce problème ?
O.C. – Handicapées ou pas, deux personnes sont différentes. Le but, aujourd’hui, est de proposer un projet personnalisé à chacun en fonction de son désir, de ses compétences ou de ses capacités.
Est-ce que le séjour à Sésame Autisme est limité dans le temps ?
O.C. – Non, aucune limite, nous avons des gens depuis vingt ans. Les personnes qui nous rejoignent, sont tout à fait libres d’avoir d’autres choix de vie, de changer d’établissement ou tout simplement de rejoindre la vie courante.
Tant qu’ils sont ici, ils sont encadrés et votre but est d’établir des relations avec l’extérieur : personnes ou entreprises. Comment procédez-vous ?
O.C. – Oui les personnes qui sont ici sont encadrées. On fonctionne en équipe. Elles sont encadrées par un moniteur d’atelier qui les accompagne. Le but étant de leur fournir un travail et de développer un lien social avec l’extérieur, la ville, l’entreprise.
Au niveau de l’autonomie, où en sont-ils ?
O.C. – Il y a de très grandes différences de niveau. Il y a des personnes qui doivent être accompagnées 24 heures sur 24 : la journée, elles sont au travail et le soir, elles doivent être reconduites dans leur foyer. D’autres, sont tout à fait autonomes, vivent dans leur appartement et sont simplement accompagnées pour régler quelques problèmes administratifs.
Est-ce que vous avez des critères qui vous permettent de juger vos degrés de réussite ?
O.C. – On n’a pas de critères particuliers. On peut dire que l’on a réussi, quand on voit que les personnes peuvent faire leur travail tranquillement, qu’elles peuvent participer à des activités dans le village, s’inscrire dans des activités de loisirs, avoir des projets de vacances… On espère que c’est la grande majorité aujourd’hui.
Pouvez-vous nous détailler les activités que nous avons vues ?
O.C. – Oui, le bois de chauffage, par exemple, est une activité intéressante. Nous achetons le bois en grosse quantité. Nous le débitons, nous le refendons nous le livrons et surtout, nous le rangeons chez le client. C’est une chose qui sort un peu de l’ordinaire, puisque vous n’avez pas le tas bois devant la porte et le week-end pour le mettre en place. D’autre part, ça permet un contact entre les gens et celui qui effectue la livraison.
Est-ce que les professionnels du chauffage ne vous regardent pas de travers en tant que concurrents déloyaux ?
O.C. – Oui, il y a une vieille image qui ne devrait plus être aujourd’hui, dans le sens où les ESAT étaient des concurrents déloyaux qui vivaient avec des financements de l’Etat. Ce n’est plus du tout comme ça que ça marche. Il y a effectivement des aides vers le personnel d’encadrement et elles sont de plus en plus restreintes ; Par contre, tous les investissements en matériel, sont faits par le budget économique de l’établissement qui a les mêmes charges qu’une entreprise lambda.
Nous sommes ici à l’ESAT qui est une composante de Sésame Autisme, quelles sont les autres ?
O.C. – En fait, Sésame Autisme regroupe plusieurs établissements. On regroupe des établissements pour petite enfance et adolescence. Comme ici, l’ESAT, lieu de travail et d’hébergement. Vous retrouvez des établissements labellisés foyer d’accueil médicalisé pour des personnes plus en difficulté, et qui on besoin d’un accompagnement en soins un peu plus intensifs. Et depuis le 1er février, un établissement pour personnes handicapées vieillissantes a ouvert à Saint-Mamert-du-Gard.
Nous sommes allés nous promener un peu de partout et jusque dans les légumes bio… ?
O.C. – Oui, effectivement, nous avons eu depuis 2000 une démarche bio. L’idée, c’était de respecter la nature au maximum et d’éviter toute sorte de pollutions. De plus, nous nous sommes rendu compte qu’ il y avait de plus en plus de demande pour le bio ou tout au moins pour une agriculture raisonnée.
Quels sont vos clients en bio ?
O.C. – Déjà, une clientèle interne, puisque nous favorisons les personnes que nous accueillons en les faisant manger le plus naturellement possible. Nous avons aussi des magasins du coin labellisés « bio ». Nous avons un partenariat avec la cuisine centrale de la communauté de commune pour la restauration scolaire. Et ce qui est moins connu, ce sont les particuliers qui peuvent tout à fait venir se servir au mas. Autre culture bio aussi, c’est la vigne qui est quand même une tradition Vauverdoise. Sans oublier l’exploitation de nos 1 500 oliviers.
Parlez nous de ce hangar que nous avons visité et qui abrite un gros broyeur.
O.C. – C’est la dernière innovation. Nous sommes en train de mettre en place une activité de destruction de documents, y compris de documents sécurisés. Ça va servir à éviter tout ce qui est pollution en les brûlant. Nous allons les détruire puis les recycler. Après les avoir détruits, nous allons les mettre en balles et les vendre à des papeteries pour refaire du papier. C’est une grande économie d’eau et d’énergie, car li est plus facile de partir de ce papier broyé que d’un arbre. D’autre part, sur le bassin Nîmois, nous gérons deux cuisines qui sont dans des établissements médicaux sociaux mais qui n’ont rien à voir avec notre association. Là, des personnes handicapées accompagnées de leur moniteur, vont préparer des plats et établir des menus complets pour d’autres personnes handicapées qui sont dans l’établissement.
Comment êtes-vous financés ?
O.C. – Il y a plusieurs financeurs, sur la partie travail, nous avons l’ARS (Agence régionale de la santé, ancienne DRASS) qui prend en charge certains coûts de salaire, d’investissement ou d’immobilier. Mais je vous le redis, la majorité de nos investissements, viennent de notre activité.
Vous avez donc de l’argent public, est-ce que vous êtes soumis à des contrôles et avez-vous des obligations de résultats ?
O.C. – Nous avons des obligations de résultats dans la bienveillance pour les personnes que nous accueillons. Une personne handicapée ne peut pas se retrouver du jour au lendemain sans salaire ou sans logement ; Nous sommes toujours obligés de l’accompagner. L’ARS est un partenaire avec qui nous échangeons tous les jours.
Et les différentes collectivités locales ou territoriales ?
O.C. – Le Conseil Général, lui, est notre premier financeur pour tout ce qui est logement et hébergement. Par ailleurs, à l’initiative de la mairie et de la préfecture, il nous a été demandé de développer des actions à la suite du classement de Vauvert en zone de sécurité prioritaire. Il est évident que tout ce qui permet de nous ouvrir sur l’extérieur, ou que l’établissement soit traversé par des personnes de l’extérieur, tout est intéressant pour le développement social des personnes que nous accueillons. Ça été intéressant pour les personnes que nous accueillons ou pour les jeunes qui sont venus de Vauvert. Ces jeunes qui pour certains étaient sortis du système scolaire, qui n’avaient pas trop accès à l’emploi, le fait de venir chez nous leur a permis de voir autre chose.
Nous remercions chaleureusement Olivier Colas pour son accueil et espérons que l’ESAT de Sésame Autisme sera un peu mieux connu. Dans un prochain reportage, nous vous présenterons Sésame Autisme Petite Enfance, grâce à un entretien avec Fabien Delmas, son directeur.
Edmond Lanfranchi