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Mimi Barthès nous a quittés et avec elle c’est tout un pan de notre vie collective qui s’en va.
En 2012, avec Albert Gavanon (Brétou), nous avons consacré deux articles sur Paul et Mimi Barthès au temps du Café du Caveau. À cette occasion, nous avons recueilli les souvenirs et témoignages de Mimi.
Ces souvenirs personnels, parfois intimistes, qu’elle nous a livrés sont un instantané de la société vauverdoise des années 1950 – 1970. Ils enrichissent notre mémoire collective.
Amy Barthès (Mimi), née le 24 novembre 1925 à Vauvert, dans la rue Emile Jamais, en face l’ancien Alcazar, haut lieu de la vie vauverdoise d’avant-guerre. Fille d’Anne-Marie Martin (née Salvère, dont les parents étaient originaires d’Aimargues et Saint-Laurent d’Aigouze) et de Marcel Martin, né à Vauvert (dont le véritable patronyme était Sylvain, Martin étant son deuxième prénom).
« À l’Etat Civil, il a été enregistré Marcel Sylvain Martin. Mon père était de Vauvert et son papa venait des Cévennes. J’avais deux frères : Paul Martin et Henri Martin et j’ai une sœur, Sylvette, qui habite Miramas. »
Quelle était la profession de vos parents ?
Mon père était viticulteur, il avait quelques vignes, et travaillait comme ouvrier agricole en plus de ses quelques vignes. Il a fini chez Francis Desjardin (propriétaire viticole). Ma mère avait la charge du foyer et complétait les revenus avec quelques ménages.
Vous avez fait votre scolarité à Vauvert.
Ecole maternelle, Mme Abauzit, directrice
Ecole primaire, élémentaire, cours rue Carnot : Lucette Abauzit, Mlle Alais. L’école des filles de la rue Carnot comportait également un cours complémentaire avec Mlle Daumas. Ma scolarité a été abrégée avec la guerre.
Vous souvenez-vous de vos camarades de classe ?
Aimée Berrus, (mére de Suzie Mattonai et Jean-Claude Guiraud), Césarine Morelli qui habitait dans la rue Pleignol, les soeurs Manzanarès. Le jeudi, j’allais aux cadettes, c’était Odette Verdier qui s’en occupait.
39-40 : la seconde guerre mondiale
J’avais treize ans quand mon père a été mobilisé au début de la guerre, le 31 août 1939 (juste après la fête de Vauvert). Il est parti un des premiers avec le père d’Aimé Bastide (grand-père de Chantal), ma sœur n’était pas encore née. Puis une loi est passée et les pères de quatre enfants ont les a renvoyés dans leur foyer.
Ce fut un moment difficile ?
Mon père à ce moment-là travaillait chez Monsieur Ramuzat, père de Maurice. J’ai travaillé pendant la guerre dans l’épicerie des Docks Méridionaux, tenue par Monsieur Cambon. (le magasin était située à l’angle de la rue de la Révolution et la rue Victor-Hugo). A l’époque, il y avait deux Docks Méridionaux à Vauvert ; le second se situait dans la rue Carnot. Les Arnoux, tenaient l’Étoile du Midi en face.
Puis, juste après la guerre, j’ai travaillé à la coopérative avec Fernande Auzilhon. Il s’agissait d’une coopérative d’alimentation, créée par la municipalité de Robert Gourdon afin de faire face à la désorganisation économique et sociale du village. Elle fonctionnait en complémentarité des « Caisses de Secours » et des « Caisses de retraite » avant la mise en place de la Sécurité sociale. Ils se ravitaillaient à Nîmes, puis faisaient la distribution pour les vauverdois. Monsieur et Madame Chopard ont pris la suite.
Je me souviens de la Libération de Vauvert, du discours de Monsieur Guigou et puis de la joie des vauverdois.
Comment avez-vous connu Paul ?
Je l’ai connu à la coopérative avec Fernande ; C’était en 1945. Paul jouait au ballon à Vauvert mais, il a fait les chantiers de jeunesse à Saint-Pons dans l’Hérault, et puis, il est allé en Allemagne, à la Libération pour conduire des camions. Il a fait trois ans en tout. Ce qui fait qu’il n’a commencé au football qu’à 23 ans.
Je l’ai connu en 1945 chez Fernande et nous nous sommes mariés en 1946, le 19 octobre.
Et, c’est à cette époque que Nîmes Olympique est venu le recruter. Il jouait au FCV de 1943 à 1945).
Voilà, c’est l’entraîneur de Nîmes, René Dedieu, qui est venu le chercher en 1946.
Les choses se sont faîtes rapidement. Monsieur Dedieu (entraîneur de Nîmes de 1946 à 1948 puis de l’Olympique d’Alès en 1953) lui a fait signer une licence mais à cette époque, il n’était pas question de contrat et d’argent. Cependant, le président du FCV, Roger Fulcrand n’était pas trop content de l’apprendre à postériori car il aurait aimé demander une petite compensation pour le club, ce qui se comprend. Nous-mêmes, nous l’avons un peu regretté car nous aurions aimé que le club vauverdois obtienne quelque chose. Mais à cette époque, les recrutements ne donnaient pas lieu à contrats.
En 1951, ils sont montés en première division. Puis, Paul est allé jouer à Alès.
A Alès, Jean Sadoul était alors le président (1951 à 1957) avant de présider la Ligue de football professionnel.
Paul a fait plusieurs saisons à Alès mais ça commençait à devenir pénible de concilier une carrière de footballeur professionnel, les déplacements, et la responsabilité d’un commerce.
Quelques années plus tard, Paul a souhaité arrêter sa carrière de footballeur professionnel. Alors qu’il avait signé une nouvelle licence à l’Olympique d’Alès, il a fait part de son intention à Maître Sadoul. Ce dernier qui avait une totale confiance en Paul n’a pas fait de difficulté.
« Bon Paul, tu ne veux plus jouer, je ne peux pas t’en empêcher. »
Paul revient donc à Vauvert et signe au FCV. Mais voilà qu’à Alès, ça ne marchait pas trop, l’équipe avait de mauvais résultats. Jean Sadoul qui avait de bonnes relations à la Fédération a fait annuler en accord avec Fernand Sainpierre la licence au FCV et ramène Paul à Alès. Il a ainsi fait deux nouvelles saisons à Alès.
Puis, il est revenu jouer à Vauvert 1957-1958-1959-1960-1961.
Le FCV lui a fêté son jubilé le 12 mai 1962.
C’est l’époque où vous avez pris le bar du Caveau.
Effectivement, nous avons pris le bar début décembre 1951.
Le propriétaire, c’était Monsieur Blaise. Le bar était sur le nom de Paul mais c’est moi principalement qui le tenait. Peu de temps après, la toiture du bar s’est effondrée , et comme Monsieur Blaise n’a pas voulu faire de réparations, Maître Sadoul nous a conseillé de le prendre en viager et de faire les réparations à notre compte. A ce moment là, ça brillait pas trop. Mais enfin, ça s’est passé et voilà.
Quand Paul partait, parce que pendant quelques années il est parti, c’était Gilbert Auzilhon et sa femme, Simone, qui venaient me donner un coup de main. Paulette Borie un peu plus tard nous a aussi apporté son aide.
Quelles associations avaient leur siège au bar du Caveau ?
La lyre vauverdoise qui était au départ un orphéon. Quand nous avons pris le café, c’était l’Orphéon avec le père Auguste (Augustin Auguste, ancien régisseur de la troupe Désir) comme président.
Le football club vauverdois à l’époque des présidents Fernand Saint-Pierre et Joseph Radelyevitch.
Les boules sont venues après tout comme l’association musicale.
Les bars étaient des lieux conviviaux avec beaucoup d’ambiance.
C’était effectivement des lieux de loisir où les gens se rencontraient. A l’époque, il n’y avait pas de télévision. Du reste, nous avons été les premiers à l’installer au bar. Les gens venaient surtout pour discuter et jouer aux cartes. Le soir, avant et après souper, Ils faisaient des parties de belote ou de rami jusqu’à la fermeture.
A quoi jouait-on ?
Il se jouait beaucoup à la belote. Puis, plus tard, ils avaient monté une table de bridge avec Fernand Marc, Antonin Arnaud, le coiffeur, Monsieur Noguier, Paul s’y été mis aussi. Le rami connaissait également beaucoup de succès. Et puis, il se jouait aussi un peu au poker. Et bien sûr les lotos…
De novembre à février, comme maintenant, on jouait aux lotos dans les cafés. Il y avait beaucoup de monde. Chaque société organisait son loto à son siège. Puis, plus tard, Jo Guyot a sonorisé l’ensemble des cafés et les différentes associations jouaient à tour de rôle.
Pour Noël, on faisait le loto juste après la messe de minuit. C’était l’orphéon et le père Auguste qui l’organisaient. Pour Noël, en plus des lotos, il y avait des loteries. L’Escoube (Monsieur Escouroux), François Ruiz faisaient des loteries.
La naissance de Jean-Marie
Il est né le 24 août 1948,
Quand nous nous sommes mariés, nous avons habité une maison dans la rue du Puits, qui appartenait à Monsieur Cazecour, à proximité du café. J’ai accouché chez maman, rue Broussan. Puis nous avons vécu pendant trois ans une vie tranquille, rue du Puits. Car ce n’était pas possible de vivre en permanence dans le café au milieu du bruit.
D’ailleurs après la naissance de Jean-Marie, j’ai été un peu dépressive car je parlais toute la journée aux clients et le midi, je n’arrivais plus à parler. Nous avions acheté une maison qui jouxtait le café où nous avions aménagé un espace privatif. Mais, comme nous avions beaucoup de monde , peu à peu, nous avons agrandi le café et nous nous sommes réfugiés dans une toute petite cuisine.
Vous aviez également un serveur, Fernando.
Fernando est venu à Vauvert – il avait fui la guerre civile et il était réfugié clandestin – puis, il a été embauché à la Méridionale. C’était une entreprise de Béziers qui avait construit le collège Jean Macé et où travaillait Pierre Valette. Et maman, qui faisait à manger au café du Commerce, chez Monsieur et Madame Avouac, (pour les ouvriers qui travaillaient pour le pétrole et autres) nous l’a fait rencontrer. Nous nous sommes liés d’amitié et il venait nous donner un coup de main pour servir au café. Ainsi, nous l’avons un peu adopté. Il avait une chambre chez mes parents et il mangeait avec nous. Ses neveux sont venus ensuite d’Espagne et nous avons très bien communiqué ; et nous, nous sommes allés chez eux à Madrid. Quand nous avons quitté le café, il est allé sur Nîmes travailler au petit bar de la Bourse. Mais comme c’était un garçon qui jouait beaucoup, je ne sais pas ce qu’il y a eu, s’il est allé dans un tripot où un endroit mal famé, il a disparu de la circulation. Il aurait fallu entreprendre des recherches mais comme il n’était plus chez nous, nous n’avions plus de contact et on ne sait pas ce qu’il est devenu. On ne sait pas. J’ai fait une lettre à ses cousins pour leur expliquer la situation mais nous n’avons plus eu de nouvelles.
Et le café, vous l’avez gardé jusqu’à quand ?
Nous y sommes restés jusqu’en 1974 (23 ans) et c’est Jean-Marie qui l’a repris. Mais entre temps, quand je suis parti du café, j’ai acheté la maison de Jean Bouet, rue des Capitaines avec la droguerie à la place de la boucherie. IL y avait un grand appartement et le magasin. Nous habitions l’appartement et je tenais la droguerie. C’était un bel ensemble immobilier. Mais le commerce n’a pas très bien marché parce que les supermarchés se sont ouverts à ce moment là.
Jean-Marie a pris le café en 1974, ils y sont restés dix ans.