You are currently viewing Franquevaux au cœur du Grand Site de France de la Camargue Gardoise

La journée du 2 juin marquait le premier événement du 10ème anniversaire du Grand Site de France de la Camargue gardoise.

Franquevaux est un haut lieu de cette région si particulière, courant de Saint-Gilles au Grau du Roi, riche d’un écosystème exceptionnel, de traditions si spécifiques et d’une histoire étonnante.

C’est de son histoire dont il a été question en première partie de cette balade contée.
Entre passion, pédagogie et enthousiasme, Evelyne Galinier, adjointe Beauvoisinoise,  déléguée au tourisme, a déroulé le fil de l’histoire du hameau qui débuta peu ou prou, de la façon suivante :

Après le déclin de l’empire romain et les invasions barbares, laissant l’Europe en état de chaos, Charlemagne s’attache à réorganiser la société et soutenant, entre autres, la religion.

Il imposera à la vie monastique, la Règle de Saint-Benoît, plus connue sous le nom d’Ordre des Bénédictins, qui deviendra la base culturelle et identitaire commune à partir du 8ème siècle.

Les abbayes bénédictines sont des centres de vie religieuse et culturelle : elles participent à l’évangélisation et au défrichement et sont, de par leurs richesses, de véritables puissances politiques.

A la fin du 11ème siècle, apparaît l’ordre cistercien, branche réformée des bénédictins. Son origine remonte à la fondation de l’abbaye de Cîteaux par Robet de Molesme, en 1098..

Les cisterciens reprennent à leur compte la règle de Saint-Benoît de façon plus stricte que les bénédictins et fondent à leur tour des abbayes. Cinq abbayes primaires vont être fondées, dont l’abbaye de Morimond en 1115. Cette abbaye est dite primaire. Elle essaimera de nombreuses « filles » sur tout le territoire européen ; l’abbaye de Franquevaux est l’une d’elle.

Le père-abbé Galtérius arrive en 1015 avec 12 autres moines au Château de Beauvoisin. Ils y seront logés jusqu’à trouver un emplacement pour la future abbaye. Deux ans après, c’est un petit bout de terre camarguais qui est choisi pour son isolement, répondant en cela aux règles des Cisterciens : chasteté, pauvreté, obéissance et silence. Douze autres moines rejoindront les premiers et une abbaye sera construite et rayonnera pendant des siècles jusqu’à son déclin et sa destruction à la fin du XVIIIème siècle. 

C’est sur les ruines de cette abbaye de 46 mètres de long que le hameau de Franquevaux sera construit.

Hormis le nom des rues et de certaines bâtisses, rien ne laisse entrevoir à celui qui s’y promène, que le hameau fut jadis une abbaye florissante, dotée d’un port de commerce par lequel transitaient hommes et marchandises et dont les possessions, au sommet de sa puissance, s’étendaient de Lunel à Arles, et jusqu’en Lozère. Pourtant, à y regarder de plus près, beaucoup de demeures privées cachent encore aujourd’hui des vestiges du bâtiment, la cour du cloître, le cellier vouté, la voute à 5 branches.

La voute à cinq branches

Le lien avec Beauvoisin sera définitivement scellé lorsqu’en 1791, des officiers de Louis XVI font l’inventaire des biens de l’abbaye et mettent en vente les terres qui seront vendues à un groupe de 24 habitants de Beauvoisin (dont certains noms raisonnent encore familièrement aux oreilles des Beauvoisinois : Amphoux, Giran, etc…)  Les ruines quant à elles, seront cédées à un Capitaine dont la grande lignée construira le hameau.

Après nous avoir relaté la vie monacale, riche de détails et d’anecdotes plus intéressants les uns que les autres (et que vous pourrez découvrir lors des prochaines journées du patrimoine ou en cherchant dans les archives de Voir Plus, un article du 31 août 2019 (https://voir-plus.com/2019/08/31/franquevaux-si-lhistoire-de-labbaye-nous-etait-contee/), nous nous sommes dirigés (« par la seule départementale en cul de sac de France » – s’amuse Evelyne Galinier –) vers le pont qui marque la frontière entre la Costière sèche et le « palus ».

Le canal du Rhône à Sète, barrière entre la zone humide et la zone sèche, a été construit à la fin du 18ème siècle pour faciliter les échanges commerciaux entre la vallée du Rhône et le sud-ouest de la France.

Du port médiéval de Franquevaux ne partaient que des bateaux à fond plat tirés par des chevaux sur les chemins de halage. L’eau y était si peu profonde qu’un premier port fut ensablé et qu’un deuxième dut être construit !

La zone humide est une zone de roselières avec en son sein, l’Etang du Scamandre, petite mer intérieure.

Jadis, les roseaux étaient fauchés tout au long de l’année, pour nourrir les bêtes et couvrir les toitures.

Actuellement, la « sagne » n’est faite qu’une fois par an, en hiver, et mécaniquement. Il en découle une désaffection du biotope qui n’est plus entretenu par ceux qui, chaussés de hautes cuissardes et faucille à la main, s’enfonçaient dans le marais pour y faire des paquets.

Les marais et les roselières ont un rôle de déversoir : elles reçoivent les pluies de la Costières, et le trop plein du Rhône, mais elles reçoivent également, par le canal, les eaux salées de la méditerranée lors des gros coups de mer.

Le taux de salinité augmente peu à peu, mettant ainsi en péril l’équilibre fragile de cet écosystème.

Serge Colombaud, représentant du Syndicat Mixte pour la protection et la gestion de la Camargue Gardoise, en a fait la démonstration en recueillant de l’eau pour en mesurer le taux de salinité.

« La Camargue Gardoise est victime, comme partout ailleurs, du changement climatique, mais aussi, du déclin des activités traditionnelles de chasse, de pèche, d’élevage, de sagne manuelle… Toutes garantes d’un entretien des terres peu couteux pour la collectivité et nécessaire aux activités humaines. Leur déclin entraîne une transformation des lieux qui ne pourra être évitée qu’au prix d’un effort économique très (trop) important. »

Du pont de Franquevaux, il est aisé de se rendre compte des résultats d’une nature « livrée à elle-même », quand la pinède prend la place des roseaux, chassant le butor étoilé de son habitat protégé.

Après cette balade, un verre de l’amitié et un pique-nique tiré du sac, Evelyne Galinier invitait le public sur les traces de la culture bouvine… et l’histoire unique des empègues (que vous pourrez retrouver dans un article Voir Plus du 25/09/2021 et très certainement, lors des journées du patrimoine !)

L’équilibre est fragile et maintenu avec force et conviction par des hommes et des femmes de terrain, engagés, passionnés par leur région et qui ne veulent pas la voir disparaître.

Elisabeth Roux

Originaire de Beauvoisin, passionnée de musique, d’écriture, de lecture et de culture, c’est avec beaucoup de plaisir que j’ai rejoint l’aventure collective de Voir Plus pour amener ma pierre à l’édifice et soutenir la culture de mon village et de cette Petite Camargue que j’aime tant, dans toute sa diversité et sa richesse.
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